Mauritanie
C’est au Bundao Lodge à Yayem dans le Sine Saloum que nous faisons le point un soir avec Stan. Nous sommes au Sénégal depuis presque deux semaines. Il pleut sans discontinuer en Casamance, nous avons déjà bien vadrouillé dans ce petit pays et finissons par nous avouer que oui il y a des chances que nous commencions à tourner en rond. Pas de véritable intérêt d’aller en Gambie, quant au Mali, la situation politique est tendue.
Remonte alors à la surface un doux rêve, celui de rentrer en France par la Mauritanie, le Sahara occidental, le Maroc… Nous plions bagage, direction Saint-Louis que nous retrouvons avec plaisir. Nous prenons contact avec nos différentes connaissances. Ceux qui ont déjà fait le voyage nous encouragent, les autres…
Ray, le patron du Siki, fait régulièrement la traversée. Ils nous donne le contact d’un chauffeur et nous conseille de traverser à Diama plutôt qu’à Rosso, gros poste frontière où l’attente peut s’avérer pénible.
Un taxi nous dépose donc à Diama où notre chauffeur nous attend de l’autre côté du fleuve. Nos formalités de visas accomplies dans une cahute de 3 m2 où l’on suffoque le douanier nous explique que nous avons la chance de ne payer que 55 euros, il y a trois mois c’était 130 !
Nous n’avons pas roulé 5 km dans notre vieille 504 que nous devons nous arrêter. Deux représentants de l’ordre que le bruit du moteur a tiré de leur sommeil viennent à notre rencontre. Nous traversons une réserve naturelle, il faut payer ! Effectivement nous avons croisé quelques facochères. Nous avons beau leur expliquer que nous ne faisons que traverser pour rejoindre Nouakchott, nous comprenons vite que le plus rapide est de sortir un billet.
Notre contribution à la réserve acquittée, nous reprenons la route. Après une cinquantaine de bornes nous retrouvons l’asphalte. Une route qui coupe droit au travers du désert, balayée par le sable et bordée de squelettes de chameaux et de bagnoles. Nous sommes dans le Sahara, fascinés par l’omniprésence du sable et du vent, la volupté des dunes d’où surgissent des chameaux. Notre chauffeur rabat son cheche sur son visage et nous enjoint de fermer les fenêtres de notre habitacle brûlant. Nous goûtons nos premières gorgées d’eau minérale fumante. Maxime est collée à la fenêtre, le sourire aux lèvres, elle retrouve ses souvenirs mongols, l’immensité, un tableau de Dallanegra. Ça et là, un campement nomade ponctue le paysage d’une preuve d’humanité, ou un badaud perdu au bord de la route qui lève le pouce.
Nous arrivons à Nouakchott en fin d’après-midi et posons nos sacs dans une chambre d’hôtes. Nouakchott, bien que capitale, est une ville de sable étendue de tout son long sans charme si ce n’est celui de se sentir au bout du monde. La maison accueille des expats en attente de leur logement et deux journalistes venues réaliser un sujet sur les femmes mauritaniennes. Notre tourisme familial les surprend ! En tchatchant avec nos hôtes, nous leur faisons part de notre intention de rejoindre Nouadhibou par le banc d’Arguin. On nous conseille encore une fois un chauffeur propriétaire d’une belle Toyota.
C’est ainsi que nous rencontrons « Grincheux » ! Non qu’il soit nain mais d’une capacité à râler rarement égalée ! Un merveilleux bonhomme d’une soixantaine d’années portant toute la fierté mauritanienne dans son ample boubou bleu. Grincheux n’aime pas les enfants, en particulier les filles. Les siennes sont avec leur mère « elles mangent et elles dorment », tout un programme.
Il nous embarque dans son 4x4 cédé par un quatari, direction le banc d’Arguin. Après avoir chargé eau et victuailles pour nos trois jours de trip nous retrouvons la monotone RN2. Après quelques heures nous coupons enfin à travers pistes. On embarque un vieux sorti de nulle part à l’arrière du camion et faisons notre première halte à Mamghar, village de pêcheurs Imraguens. Le village dispose d’un campement « touristique », un peu à l’écart, géré par les femmes. Nous sommes seuls.
Les Imraguens sont des descendants d’esclaves, à la peau fonçée, dont l’activité est celle de la pêche au mulet jaune sur de beaux bateaux à voiles latines. Pas de lanches au large, ce n’est pas la saison ! Pas plus de poutargue. Grincheux nous honore de sa spécialité, un ragoût de chameau. Il avouera lui même que la bête devait avoir un certain âge. Les trois thés qui suivent sont en revanche magnifiques. Le premier, amer, le second plus doux et le troisième parfait. La cérémonie du thé n’est pas une mince affaire pour les mautitaniens qui ne se déplacent jamais sans leur matériel. Nous nous endormons tôt.
Le lendemain, Grincheux a déjà eu le temps de faire sa prière quand nous émergeons. Trois thés et nous repartons pour un autre village d’Imraguens. Lorsque nous quittons le village, les enfants s’agrippent au 4x4, un jeu dangereux qui rend dingue notre ami qui décrète que ces descendants d’esclaves n’ont vraiment aucune éducation.
Avant de nous arrêter au Cap Tafarit, nous nous attardons dans un nouveau village où nous sommes invités à boire le thé. Nous acceptons avec plaisir, grincheux râle, le sol va être trop chaud, il faut partir. Trop tard l’ami, le cérémonial est en route et nous venons de lancer un concours de dessin et les enfants affluent sous la tente. Nous découvrons alors que notre chauffeur est également dentiste à ses heures. Un homme arrive avec une joue énorme, notre dentiste du désert applique une lotion de sa confection sur la gencive boursouflée, prend son billet et assure au pauvre diable qu’il n’a plus aucun souci à se faire. La scène est d’un autre temps. Je demande au docteur s’il a laissé au vieux un peu de son liquide aux clous de girofle. Il est indigné, il ne va quand même pas lâcher son brevet dans le désert !
Nous repartons après de longs adieux, le sable est chaud, très chaud. Grincheux descend du 4x4, il a perdu la piste. Il regarde au loin, plus de trace. Nous nous ensablons, il nous l’avait bien dit ! La piste est un art que nous prenons un peu à la légère ! Il dégonfle les pneus. Il s’en sort, nous n’aurons pas besoin de creuse et arrivons au Cap en fin de journée, des dizaines de nuances de sable dans la tête, ocre, bleu, gris, jaune, blanc… Quel fou peut imaginer que le désert est monotone ! Nous devinons Tafarit dans un mirage, plus du tout certains de ce que nos yeux perçoivent. La silhouette du cap se précise pourtant, le lieu est magnifique, le village désert. Nous parvenons dans notre nouveau camp où les tentes marocaines narguent les mauritaniennes. On nous demande de choisir. Seuls, nous avons l’embarras du choix ! Je passe la tête sous une tente marocaine. L’odeur de plastique est intenable, comme une bagnole trop neuve. Nous choisissons une vieillerie aux parois de tissus qui nous laissent deviner la vue sur mer. Les filles sont aux anges.
Nous allons nous balader sur la plage où cormorans, flamants roses et pélicans se partagent les airs et bancs de sable. Et là, nous apercevons au loin une lanche qui rentre. Hé hé, le dîner se profile. Nous attendons patiemment. Les voilà ! La prise semble maigre… mais belle. J’aperçois ce qui semblerait être une langouste. Les gars débarquent. C’est bien une langouste d’au moins 2,5 kg. Combien les amis ? 7€ le kg ?! On prend !!! Les mecs pensent vraiment qu’on est des américains échoués sur le banc d’Arguin. Peut importe, nous rapportons notre prise au campement. Grincheux nous regarde de travers, il n’a aucune idée de ce que nous ramenons. On lui explique que nous allons faire griller la bête. Sceptique, il se marre en nous souhaitant bon courage pour trouver du bois ! C’est mal nous connaître… Le périmètre est ratissé, la flambée prend. Stan opère la langouste préhistorique qui après une demi heure sur le feu, coupée de tout son long, continue de gémir et bouger. Notre mauritanien prédit qu’elle continuera à vivre dans notre estomac. Nous chantons autour du feu, c’est au tourde grincheux, qui nous clame des vers arabes. Mahault lui fait remarquer que c’est de la triche, on avait dit « chanter » ! La soirée se termine au coin du feu, le ventre plein et le sourire aux lèvres.
Nous levons le camp le lendemain, direction Nouadhibou. A Nouakchott, quelqu’un m’a dit que la ville était sympa. Hahaha,la bonne blague ! Nous découvrons parpaing land.
Ray, le patron du Siki, fait régulièrement la traversée. Ils nous donne le contact d’un chauffeur et nous conseille de traverser à Diama plutôt qu’à Rosso, gros poste frontière où l’attente peut s’avérer pénible.
Un taxi nous dépose donc à Diama où notre chauffeur nous attend de l’autre côté du fleuve. Nos formalités de visas accomplies dans une cahute de 3 m2 où l’on suffoque le douanier nous explique que nous avons la chance de ne payer que 55 euros, il y a trois mois c’était 130 !
Nous n’avons pas roulé 5 km dans notre vieille 504 que nous devons nous arrêter. Deux représentants de l’ordre que le bruit du moteur a tiré de leur sommeil viennent à notre rencontre. Nous traversons une réserve naturelle, il faut payer ! Effectivement nous avons croisé quelques facochères. Nous avons beau leur expliquer que nous ne faisons que traverser pour rejoindre Nouakchott, nous comprenons vite que le plus rapide est de sortir un billet.
Notre contribution à la réserve acquittée, nous reprenons la route. Après une cinquantaine de bornes nous retrouvons l’asphalte. Une route qui coupe droit au travers du désert, balayée par le sable et bordée de squelettes de chameaux et de bagnoles. Nous sommes dans le Sahara, fascinés par l’omniprésence du sable et du vent, la volupté des dunes d’où surgissent des chameaux. Notre chauffeur rabat son cheche sur son visage et nous enjoint de fermer les fenêtres de notre habitacle brûlant. Nous goûtons nos premières gorgées d’eau minérale fumante. Maxime est collée à la fenêtre, le sourire aux lèvres, elle retrouve ses souvenirs mongols, l’immensité, un tableau de Dallanegra. Ça et là, un campement nomade ponctue le paysage d’une preuve d’humanité, ou un badaud perdu au bord de la route qui lève le pouce.
Nous arrivons à Nouakchott en fin d’après-midi et posons nos sacs dans une chambre d’hôtes. Nouakchott, bien que capitale, est une ville de sable étendue de tout son long sans charme si ce n’est celui de se sentir au bout du monde. La maison accueille des expats en attente de leur logement et deux journalistes venues réaliser un sujet sur les femmes mauritaniennes. Notre tourisme familial les surprend ! En tchatchant avec nos hôtes, nous leur faisons part de notre intention de rejoindre Nouadhibou par le banc d’Arguin. On nous conseille encore une fois un chauffeur propriétaire d’une belle Toyota.
C’est ainsi que nous rencontrons « Grincheux » ! Non qu’il soit nain mais d’une capacité à râler rarement égalée ! Un merveilleux bonhomme d’une soixantaine d’années portant toute la fierté mauritanienne dans son ample boubou bleu. Grincheux n’aime pas les enfants, en particulier les filles. Les siennes sont avec leur mère « elles mangent et elles dorment », tout un programme.
Il nous embarque dans son 4x4 cédé par un quatari, direction le banc d’Arguin. Après avoir chargé eau et victuailles pour nos trois jours de trip nous retrouvons la monotone RN2. Après quelques heures nous coupons enfin à travers pistes. On embarque un vieux sorti de nulle part à l’arrière du camion et faisons notre première halte à Mamghar, village de pêcheurs Imraguens. Le village dispose d’un campement « touristique », un peu à l’écart, géré par les femmes. Nous sommes seuls.
Les Imraguens sont des descendants d’esclaves, à la peau fonçée, dont l’activité est celle de la pêche au mulet jaune sur de beaux bateaux à voiles latines. Pas de lanches au large, ce n’est pas la saison ! Pas plus de poutargue. Grincheux nous honore de sa spécialité, un ragoût de chameau. Il avouera lui même que la bête devait avoir un certain âge. Les trois thés qui suivent sont en revanche magnifiques. Le premier, amer, le second plus doux et le troisième parfait. La cérémonie du thé n’est pas une mince affaire pour les mautitaniens qui ne se déplacent jamais sans leur matériel. Nous nous endormons tôt.
Le lendemain, Grincheux a déjà eu le temps de faire sa prière quand nous émergeons. Trois thés et nous repartons pour un autre village d’Imraguens. Lorsque nous quittons le village, les enfants s’agrippent au 4x4, un jeu dangereux qui rend dingue notre ami qui décrète que ces descendants d’esclaves n’ont vraiment aucune éducation.
Avant de nous arrêter au Cap Tafarit, nous nous attardons dans un nouveau village où nous sommes invités à boire le thé. Nous acceptons avec plaisir, grincheux râle, le sol va être trop chaud, il faut partir. Trop tard l’ami, le cérémonial est en route et nous venons de lancer un concours de dessin et les enfants affluent sous la tente. Nous découvrons alors que notre chauffeur est également dentiste à ses heures. Un homme arrive avec une joue énorme, notre dentiste du désert applique une lotion de sa confection sur la gencive boursouflée, prend son billet et assure au pauvre diable qu’il n’a plus aucun souci à se faire. La scène est d’un autre temps. Je demande au docteur s’il a laissé au vieux un peu de son liquide aux clous de girofle. Il est indigné, il ne va quand même pas lâcher son brevet dans le désert !
Nous repartons après de longs adieux, le sable est chaud, très chaud. Grincheux descend du 4x4, il a perdu la piste. Il regarde au loin, plus de trace. Nous nous ensablons, il nous l’avait bien dit ! La piste est un art que nous prenons un peu à la légère ! Il dégonfle les pneus. Il s’en sort, nous n’aurons pas besoin de creuse et arrivons au Cap en fin de journée, des dizaines de nuances de sable dans la tête, ocre, bleu, gris, jaune, blanc… Quel fou peut imaginer que le désert est monotone ! Nous devinons Tafarit dans un mirage, plus du tout certains de ce que nos yeux perçoivent. La silhouette du cap se précise pourtant, le lieu est magnifique, le village désert. Nous parvenons dans notre nouveau camp où les tentes marocaines narguent les mauritaniennes. On nous demande de choisir. Seuls, nous avons l’embarras du choix ! Je passe la tête sous une tente marocaine. L’odeur de plastique est intenable, comme une bagnole trop neuve. Nous choisissons une vieillerie aux parois de tissus qui nous laissent deviner la vue sur mer. Les filles sont aux anges.
Nous allons nous balader sur la plage où cormorans, flamants roses et pélicans se partagent les airs et bancs de sable. Et là, nous apercevons au loin une lanche qui rentre. Hé hé, le dîner se profile. Nous attendons patiemment. Les voilà ! La prise semble maigre… mais belle. J’aperçois ce qui semblerait être une langouste. Les gars débarquent. C’est bien une langouste d’au moins 2,5 kg. Combien les amis ? 7€ le kg ?! On prend !!! Les mecs pensent vraiment qu’on est des américains échoués sur le banc d’Arguin. Peut importe, nous rapportons notre prise au campement. Grincheux nous regarde de travers, il n’a aucune idée de ce que nous ramenons. On lui explique que nous allons faire griller la bête. Sceptique, il se marre en nous souhaitant bon courage pour trouver du bois ! C’est mal nous connaître… Le périmètre est ratissé, la flambée prend. Stan opère la langouste préhistorique qui après une demi heure sur le feu, coupée de tout son long, continue de gémir et bouger. Notre mauritanien prédit qu’elle continuera à vivre dans notre estomac. Nous chantons autour du feu, c’est au tourde grincheux, qui nous clame des vers arabes. Mahault lui fait remarquer que c’est de la triche, on avait dit « chanter » ! La soirée se termine au coin du feu, le ventre plein et le sourire aux lèvres.
Nous levons le camp le lendemain, direction Nouadhibou. A Nouakchott, quelqu’un m’a dit que la ville était sympa. Hahaha,la bonne blague ! Nous découvrons parpaing land.
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