Pour rejoindre le Sine Saloum de Saint Louis nous affrétons un taxi 7 places à la gare routière, constituée d’un enchevêtrement de veilles bagnoles qui a plus l’allure d’une casse que d’une gare.
Les rabatteurs se ruent sur nos valises et s’engueulent en wolof « c‘est mon toubab », on comprendra plus tard qu'une valise se monnaye 1000 FCA.
Notre véhicule, une 504 bleu nuit, aux phares dépareillés, au par choc déformé, à l'amortisseur criant est un vieux squelette désarticulé, c’est la même que mon oncle Oliver à offert à Papa, qui à son tour me l'a donnée et qui a du s’échouer sur ces cotes africaines, choyée par son nouveau propriétaire.
Nous parcourrons tambour battant à 80km/H 400 km sur des routes relativement entretenues. A chaque village le chauffeur s’arrête auprès d’un homme avachi à l’ombre d’un palmier et le paye pour l’entretien de la route ! Puis c’est au tour de la gendarmerie de le racketter. Vue l’état du véhicule, il ne passe aucun contrôle technique ! Puis dans les villes c’est la police bien plus vicieuse et enfin la douane !
A M’Bour nous décidons de nous affranchir et de louer un véhicule. Il nous mène dans l’ile de Joal Fadhiout. Nous traversons à pied un pont en bois avec notre guide imposée, Charlotte. Elle nous explique avec un accent qui fait rire sous cape les filles qu’ici vivent en totale harmonie musulmans catholiques et animistes. Comme les hollandais ils gagent du terrain sur l’eau depuis des siècles en amoncelant des tonnes de coquillages ! Le sol en est jonché et donne à l’atoll un sentiment de plénitude, de calme et de propreté malgré les cochons tout rose qui se prélassent dans les ruelles immaculées.
Au Nord, un autre pont nous transporte au cimetière, l’îlot est vallonné, une fraîche herbe vert fluo émerge du sol blanchi de coques, où se côtoient tous les cultes. Nos âmes se promènent dans les allés fleuries à la rencontre de ses habitants quand soudain Mahault nous rappelle à la réalité le pied sur une tombe « mais c’est que des os la dessous » !
Un beau matin après une nuit bercée par une pluie diluvienne, Maxime se réveille fiévreuse, le ventre torturé par milles maux après avoir mangé un poulet bicyclette. Elle nous annonce avoir le Palu ! Nous l’abandonnons dans sa couche avec un bon imodiome pour une partie de pêche à Foundioung dans la mangrove. Sur les rives un fou, Georges Consol, a construit une maison en forme de navire en hommage au Bou el Mogdad dont il fut un des propriétaires.
Nous pêchons cinq thiofs, poissons ressemblant à une rascasse, à la chaire délicate et musclée que notre pilote cuisine sur un barbecue à même la coque. Et hop un peu d’essence pour le goût ! Nous repartons dans la tempête, fouettés par les embruns et les vagues qui submergent notre frêle embarcation.
Au village de Yayem où nous logeons 5 jours, nous rencontrons Antoine qui nous balade dans la brousse avec sa carriole attelée à un jeune étalon au doux nom d'Albert. Il nous dit posséder 200 hectares mais n’a pas les moyens de les exploiter. Son père et son grand père en ont prêtés à d’autres familles qui ne veulent pas les lui rendre ! La tradition séculaire bien ancrée dans ces lieux reculés rythme la vie. Au décès les terres fertiles sont données aux hommes et les terres inondables aux femmes qui cultivent courbées le riz !
Antoine nous accueille dans son campement qui fait aussi office de bar clando, composé d’une jolie maison rose, deux cases crasseuses, de trois box pour les chevaux et d’une étable pour les chèvres, le tout entouré d’une barrière constituée de branches mortes qui me font penser à mes cabanes de Lavau ! Ici vit une bonne vingtaine de personnes tout sourire d’accueillir des toubabs. Sa voiture est cachée dans un autre village, il a peur qu'on le prenne pour un riche et surtout qu'on lui demande sans cesse des services !
Antoine nous conte son principal souci, toujours dans la bonne humeur… Au crépuscule ses dents deviennent plus blanches, ses yeux injectés de sang dû à l’alcool frelaté qu’il vend sont encore plus effrayant ! Un toubab à donné au village un tracteur de 30 ans d’âge, il est encore bloqué aux douanes à Dakar.
« Il faut une réunion de tous les gens du village. Qui va être responsable. Moi je te le dis tout cru, si c’est François qui l’utilise, c’est sûr, il ne refera jamais le plein de carburant, et franchement si c’est Youssef qui l’utilise et qu’il tombe en panne, il dira que c’est de la faute de François et François il va appeler le marabout qui fera une grigri pour guérir le tracteur ! Non, je vous le dis, c’est pas sérieux, cette affaire est grave. Il faut me le confier ce tracteur ! » dit il avec l’oeil torve et le sourire en coin ! Olivier notre hôte nous explique que le tracteur ne fera pas un mois !
Demain ont lieu les élections législatives au scrutin proportionnel, 40 listes sont sur les rangs ! Dans les rues sablées, des pickups transportent la tête de liste dans son plus beau boubou assis sur de gigantesques amplis qui envahissent les ruelles de zouc suivis par une horde de jeunes à qui on a offert un tee-shirt et 1000 FCF ! Le gouvernement a, le jour fatidique interdit, la vente de bidons d’essence et le transport interrégional !
C’est en lisant « le Figaro » local que je comprends un peu plus la problématique Africaine. Je vous livre ici un extrait : « Penda Bâ a été enfin alpaguée par la gendarmerie. C’est l’effet boomerang. Et ça bruit de partout. Depuis quelque temps, le paysage virtuel est sens dessus dessous. Entre diffusion d’images contraires aux bonnes mœurs, incitation au crime, offense au chef de l’Etat, les attaques se multiplient. La dernière porte la signature de Penda Bâ qui a craché le feu sur le président Macky Sall avec de copieuses insultes. Yeux roulés sous le mouvement papillonné de ses cils, elle s’est filmée, traitant les wolofs de traitres les aspergeant de dégueulasses insultes. Les âmes sensibles se sont bouchées les oreilles à la diffusion de ses grossièretés. D’autres, rictus de colère déformant leur visage, ont écouté les vilains propos sortant de la bouche, bavant d’insultes, de la bonne dame au teint clair, légèrement dépigmenté. A qui les délires ont couté la liberté. »
Ici tout marche a l’envers, le coût de la vie est exorbitant. Les sénégalais ne vivent que de la pêche. Ils importent tout le reste où s’additionnent une taxe de 40% à laquelle s’ajoute 10% de dessous de table et 20% de TVA soit un total de 70% plus la marge du commerçant ! Mon portefeuille s’en souviendra ! Tous les hôtels et entreprises sont dirigés par des toubabs ou couples mixtes. On a cette désagréable impression que rien ne fonctionne sans notre présence !
Une soir désabusé toujours sous la pluie, nous décidons de « sortir du bocal » dixit Anne Pat, d’abandonner notre billet de retour de Dakar et de rentrer « à pied » par la Mauritanie, le Maroc et après… inch alah ! Les filles sont enchantées de parcourir 4500Klm pour rentrer à Marseille. Vive l’itinérance.
Les rabatteurs se ruent sur nos valises et s’engueulent en wolof « c‘est mon toubab », on comprendra plus tard qu'une valise se monnaye 1000 FCA.
Notre véhicule, une 504 bleu nuit, aux phares dépareillés, au par choc déformé, à l'amortisseur criant est un vieux squelette désarticulé, c’est la même que mon oncle Oliver à offert à Papa, qui à son tour me l'a donnée et qui a du s’échouer sur ces cotes africaines, choyée par son nouveau propriétaire.
Nous parcourrons tambour battant à 80km/H 400 km sur des routes relativement entretenues. A chaque village le chauffeur s’arrête auprès d’un homme avachi à l’ombre d’un palmier et le paye pour l’entretien de la route ! Puis c’est au tour de la gendarmerie de le racketter. Vue l’état du véhicule, il ne passe aucun contrôle technique ! Puis dans les villes c’est la police bien plus vicieuse et enfin la douane !
A M’Bour nous décidons de nous affranchir et de louer un véhicule. Il nous mène dans l’ile de Joal Fadhiout. Nous traversons à pied un pont en bois avec notre guide imposée, Charlotte. Elle nous explique avec un accent qui fait rire sous cape les filles qu’ici vivent en totale harmonie musulmans catholiques et animistes. Comme les hollandais ils gagent du terrain sur l’eau depuis des siècles en amoncelant des tonnes de coquillages ! Le sol en est jonché et donne à l’atoll un sentiment de plénitude, de calme et de propreté malgré les cochons tout rose qui se prélassent dans les ruelles immaculées.
Au Nord, un autre pont nous transporte au cimetière, l’îlot est vallonné, une fraîche herbe vert fluo émerge du sol blanchi de coques, où se côtoient tous les cultes. Nos âmes se promènent dans les allés fleuries à la rencontre de ses habitants quand soudain Mahault nous rappelle à la réalité le pied sur une tombe « mais c’est que des os la dessous » !
Un beau matin après une nuit bercée par une pluie diluvienne, Maxime se réveille fiévreuse, le ventre torturé par milles maux après avoir mangé un poulet bicyclette. Elle nous annonce avoir le Palu ! Nous l’abandonnons dans sa couche avec un bon imodiome pour une partie de pêche à Foundioung dans la mangrove. Sur les rives un fou, Georges Consol, a construit une maison en forme de navire en hommage au Bou el Mogdad dont il fut un des propriétaires.
Nous pêchons cinq thiofs, poissons ressemblant à une rascasse, à la chaire délicate et musclée que notre pilote cuisine sur un barbecue à même la coque. Et hop un peu d’essence pour le goût ! Nous repartons dans la tempête, fouettés par les embruns et les vagues qui submergent notre frêle embarcation.
Au village de Yayem où nous logeons 5 jours, nous rencontrons Antoine qui nous balade dans la brousse avec sa carriole attelée à un jeune étalon au doux nom d'Albert. Il nous dit posséder 200 hectares mais n’a pas les moyens de les exploiter. Son père et son grand père en ont prêtés à d’autres familles qui ne veulent pas les lui rendre ! La tradition séculaire bien ancrée dans ces lieux reculés rythme la vie. Au décès les terres fertiles sont données aux hommes et les terres inondables aux femmes qui cultivent courbées le riz !
Antoine nous accueille dans son campement qui fait aussi office de bar clando, composé d’une jolie maison rose, deux cases crasseuses, de trois box pour les chevaux et d’une étable pour les chèvres, le tout entouré d’une barrière constituée de branches mortes qui me font penser à mes cabanes de Lavau ! Ici vit une bonne vingtaine de personnes tout sourire d’accueillir des toubabs. Sa voiture est cachée dans un autre village, il a peur qu'on le prenne pour un riche et surtout qu'on lui demande sans cesse des services !
Antoine nous conte son principal souci, toujours dans la bonne humeur… Au crépuscule ses dents deviennent plus blanches, ses yeux injectés de sang dû à l’alcool frelaté qu’il vend sont encore plus effrayant ! Un toubab à donné au village un tracteur de 30 ans d’âge, il est encore bloqué aux douanes à Dakar.
« Il faut une réunion de tous les gens du village. Qui va être responsable. Moi je te le dis tout cru, si c’est François qui l’utilise, c’est sûr, il ne refera jamais le plein de carburant, et franchement si c’est Youssef qui l’utilise et qu’il tombe en panne, il dira que c’est de la faute de François et François il va appeler le marabout qui fera une grigri pour guérir le tracteur ! Non, je vous le dis, c’est pas sérieux, cette affaire est grave. Il faut me le confier ce tracteur ! » dit il avec l’oeil torve et le sourire en coin ! Olivier notre hôte nous explique que le tracteur ne fera pas un mois !
Demain ont lieu les élections législatives au scrutin proportionnel, 40 listes sont sur les rangs ! Dans les rues sablées, des pickups transportent la tête de liste dans son plus beau boubou assis sur de gigantesques amplis qui envahissent les ruelles de zouc suivis par une horde de jeunes à qui on a offert un tee-shirt et 1000 FCF ! Le gouvernement a, le jour fatidique interdit, la vente de bidons d’essence et le transport interrégional !
C’est en lisant « le Figaro » local que je comprends un peu plus la problématique Africaine. Je vous livre ici un extrait : « Penda Bâ a été enfin alpaguée par la gendarmerie. C’est l’effet boomerang. Et ça bruit de partout. Depuis quelque temps, le paysage virtuel est sens dessus dessous. Entre diffusion d’images contraires aux bonnes mœurs, incitation au crime, offense au chef de l’Etat, les attaques se multiplient. La dernière porte la signature de Penda Bâ qui a craché le feu sur le président Macky Sall avec de copieuses insultes. Yeux roulés sous le mouvement papillonné de ses cils, elle s’est filmée, traitant les wolofs de traitres les aspergeant de dégueulasses insultes. Les âmes sensibles se sont bouchées les oreilles à la diffusion de ses grossièretés. D’autres, rictus de colère déformant leur visage, ont écouté les vilains propos sortant de la bouche, bavant d’insultes, de la bonne dame au teint clair, légèrement dépigmenté. A qui les délires ont couté la liberté. »
Ici tout marche a l’envers, le coût de la vie est exorbitant. Les sénégalais ne vivent que de la pêche. Ils importent tout le reste où s’additionnent une taxe de 40% à laquelle s’ajoute 10% de dessous de table et 20% de TVA soit un total de 70% plus la marge du commerçant ! Mon portefeuille s’en souviendra ! Tous les hôtels et entreprises sont dirigés par des toubabs ou couples mixtes. On a cette désagréable impression que rien ne fonctionne sans notre présence !
Une soir désabusé toujours sous la pluie, nous décidons de « sortir du bocal » dixit Anne Pat, d’abandonner notre billet de retour de Dakar et de rentrer « à pied » par la Mauritanie, le Maroc et après… inch alah ! Les filles sont enchantées de parcourir 4500Klm pour rentrer à Marseille. Vive l’itinérance.
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