Indonésie

Independence Day
Aujourd’hui la jeune démocratie fête ses 78 ans. Le 17 août 1945, Soekarno est nommé président et proclame l’indépendance des Indes Néerlandaises. Libéré du colonisateur le jeune archipel devait pourtant très vite subir le Nouvel Ordre de Suharto, ses massacres et déportations pendant plus de 30 ans. Ce n’est qu’en 98 que le pays a pu commencer à panser ses plaies et tourner la page de cette période noire de son histoire.

En ce jour de fête, nous quittons Jepara pour rejoindre Semarang. Nous optons pour un Grab (Uber local) pour nous mener à bon port et assez rapidement si possible. Notre chauffeur opte pour la route du sel pour notre plus grande surprise mais joie également. La route longe la côte et ses salins où s’activent les travailleurs dans un paysage parsemé de paniers remplis à ras de cet or blanc et de petits moulins à vent. Nous passons de nombreux ponts plus ou moins rassurants pour enjamber ces centaines de bras saumâtres. Des carrelets, technique de pêche importée par des marchands chinois au 14e siècle, ponctuent ce paysage singulier comme autant de petites cabanes sur pilotis. Le dernier pont nous mène à un village de pêcheurs aux bateaux chamarrés pressés les uns aux autres dans une joyeuse pagaille.

L’archipel est à la fête et les villages sont parés de leurs plus beaux fanions rouge et blanc, des estrades sont dressées en prévision des réjouissances. Les filles, au bord de l’hystérie guettent l’uniforme, portables en main quand les enfants déboulant au détour de ruelles à bicyclettes sifflent à qui mieux mieux au rythme des ondulations de la bille. Les sonos qui trônent habituellement dans chaque salon indonésien à côté de la télé habillent les trottoirs pour une bamboche qui s’annonce sonore.

Nous arrivons à Semarang, ville portuaire donnée par le Sultan à la Compagnie néerlandaises des Indes orientales (VOC) au début du 18e siècle. Enclave Hollandaise, quelques bâtiments ont survécu à l’histoire conférant à la ville un charme certain. Des centaines d’Indonésiens s’y sont donnés rendez-vous pour l’anniversaire. Par groupes d’une dizaine de personnes dresscodés, ils posent devant les vestiges coloniaux. Plus loin, l’ancienne gare ferroviaire aux cent fenêtres, aujourd’hui devenue pauvre musée, propose des studios de shooting photos reconstituant un intérieur hollandais ou un jardin japonais. Se mettre dans la peau du colon ou de l’envahisseur… Vêtues de leurs plus beaux atours Dutch, de jeunes musulmanes, sans pour autant quitter leur voile, se font blanchir la peau pour poser fièrement dans la cuisine batave. Mahault opte pour le sabre japonais à l’ombre du sakura.

A côté de notre hôtel, ancienne banque construite dans les années 50, se dresse le Spiegel. La bâtisse blanche du début du 19e en impose. Immaculée, elles rayonne au centre du coeur historique. L’adresse devient vite notre cantine où nous rencontrons Shita, jeune entrepreneuse originaire de Semarang vivant à Jakarta. Elle est accompagnée de Niels, la trentaine également, qui vit à Jepara et a monté sa boîte de fabrication de meubles en tek. La soirée avance au rythme d’un groupe de musique de charleston local, la fumée des kretek baigne l’atmosphère d’un doux parfum suranné et sucré. Les rideaux se ferment, Shita nous invite à boire un verre au comptoir et nous réalisons alors avec Stan que la jeune femme est propriétaire des lieux. Après des études à Singapour puis en Australie en architecture elle tombe sous le charme de cet ancien drugstore qu’elle décide d’acquérir à 26 ans moyennant quelques milliards de roupies. Après trois ans de travaux où elle n’hésite pas à mettre la main à la pâte, le Spiegel ouvre ses portes entraînant avec lui une politique de réhabilitation du coeur historique de la ville. C’était il y a cinq ans. Shita a conservé les volumes du lieux ainsi que les éléments d’origine faisant de ce lieu à la hauteur cathédrale où la brique répond au bois et à la ferronnerie un havre hors du temps, jonglant entre colonialisme et Indonésie contemporaine. Un beau projet que Shita a eu parfois du mal a mené. Femme, chrétienne d’origine chinoise, les menaces n’ont pas manquées. Aujourd’hui, le Spiegel est le fleuron de Semarang. Nous nous quittons à regret, nos amis doivent se lever tôt pour la cérémonie de crémation de la grand-mère de Shita.

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day

Independence Day